L’acte de nommer est aussi une traduction, l’un des premiers
actes. Le langage lui-même est traduction. Il a fallu nommer pour communiquer.
Il a fallu trouver des dénominateurs communs entre les êtres afin de pouvoir se
comprendre. Le matériel, le palpable, ce qui produit du son, les choses qui sont
des images, il a fallu leur donner un nom afin de les désigner. Nommer est un
acte arbitraire, l’humain a affecté des sons à des choses afin de les signifier
en dehors de leur présence. Et puis il a fallu parler de l’impalpable
et apprendre à communiquer l’abstrait. Il a fallu inventer. Le langage est une
invention. Il est une traduction d’une expérience de réalité vécue.
Le domaine de l’objet palpable est universel, nous pouvons
tous voir la même chose, nous pouvons la toucher, entendre le même son qu’elle
produit. On peut penser que le matériel, délimitable, est une certitude en
termes de communication, nous le nommons dans des langages différents, tous ces
mots étant supposés représenter la même chose, cet objet ici présent. Mais
déjà, sémantiquement, il ne représente la même chose pour aucun d’entre nous,
et une chose est en fait englobée par un concept rassemblant nombre de données variables entre les communautés culturelles. Et puis, nous ne pouvons pas communiquer
qu’à travers le concret, nous avons besoin d’utiliser l’abstrait.