Un gras en vaut au moins deux
dans les transports de l’entreprise il entreprend de rouler sans hésiter dans la direction de la ligne mais tergiverse au moment de tourner
sans circulation, le virage part vers une autre ligne sans changer de voie il déroule le fil du bitume pour mieux choisir sans y passer des plombes
sortant la carte et son déroulé qui dégringole sur les genoux, il écroule sur la route l’odeur des pneus sur le goudron frais
il goudronne sans tergiverser et soudain la route part dans le fossé couleur gras de plomb
la rigole, sans délibérer, attrape le rouleau de l’entreprise qui aplanit dans une direction
le liquide gluant noir du goudron digue dans un sens et se torsade d’un coup sans qu’il ne fut nécessaire d’exécuter quelconque choix
mais sa fonction au volant de la direction lui donne alors scrupule, et soudain, le gouvernail coule en direction de l’hésitation
côté orientation haut ? côté orientation bas ?
il se met à choisir tout en continuant de s’écrouler les sabots dans le vaste ruban luisant d’indécision
lourd comme du plomb qui serait coulé dans le moule de l’habitacle
il se laisse arracher la carte par la coulée grasse qui plane dans l’habitacle
et le dépliant se durcit d’un seul coup sous l’épaisseur fraîche du bitume décollé de la route
découlant de cette action délibérée, le plan plombe d’un coup l’atmosphère de l’habitacle et, en regardant de très près la carte de visite de l’entreprise, elle se met à vaciller, ondulant le long du long fil enroulé sur la route
il en faut peu pour que, dans la torsion du virage, le fossé apparaisse sans un signe préalable et immobilise l’habitacle à grands coup de vagues roulées surplombant l’habitacle le rendant statique sous le poids de plomb
dans une telle situation, l’entreprise lui a heureusement appris à réagir en toute certitude, sans s’égarer en épanchements d’hésitations vacillantes,
il saisit le gouvernail dans la marée de goudron qui envahit depuis la carte jusqu’à la ligne piétonne, et dans un geste gras, détruit l’habitacle appartenant à l’entreprise qui a pour ligne d’évacuer toute gérance maintenue par la régie qui ne gouverne plus rien et exploite les ressources de bitume gluant
Chapitre 2
ça commence d’un coup à swinguer, à tourner, à se mettre en mouvement, un des gouverneurs présents au poste de la gouvernance demande sans plus attendre qu’on délègue la tâche ingrate à celui qui est assis sur les chaises là-bas, un peu plus loin
jusqu’ici ils n’avaient pas réussi à déterminer l’origine du flux de la coulée grasse qui avait envahi soudain les lignes horizontales qui sillonnaient les marais
le mystère tournait dans leurs esprits et, se tarabiscotant, prenaient une forme abstraite qui se matérialisait parfois cependant en la forme informelle d’un rouleau compresseur
on n’avait pas l’habitude de se laisser envahir par ce genre de formes qui s’immisçaient dans les esprits à la manière d’une épaisse matière gluante qui ressemblait de près ou de loin à de l’attrape-mouches ou à du beurre
heureusement le gouverneur, gérant, maintenait le gouvernail et désigne sans plus hésiter l’homme qui est assis sur les chaises là-bas
l’homme des chaises se lève mais il s’avère qu’il ne peut en fait exécuter une telle action puisque son séant est vissé de la plus grotesque façon au siège
le gras s’est approprié l’assise rendant le soulèvement du poids de plomb tout à fait impossible
le gouverneur continue d’ordonner
l’homme des chaises hésite, vacille
et bien que le doute achève de l’ensevelir sous la coulée, il tente de se soulever le séant qui résiste sous le moule de la chaise qui a coulé dans différentes directions et le boudine bien trop pour que tout redressement soit possible hors de l’assise
le gras collant continue d’affluer sous les yeux du gouverneur qui finit par décider sans plus de doute ni aucun scrupule à laisser le gouvernail au beurre envahissant
il voit que la matière grasse s’approche en une rangée de coulis, sillonnante, pour se frayer une route jusqu’à lui
l’homme des chaises se trouve de plus en plus collé et submergé par la coulée qui lui dégringole sur le visage et les genoux,
l’odeur de saindoux afflue vers lui à grandes vagues et le submerge de tout son poids
l’odeur de la matière devance la matière elle-même et l’homme des chaises est de plus en plus paralysé tandis que le gouverneur abandonne définitivement la gouvernance
le coulis de beurre s’avance et augmente jusqu’à ensevelir parfaitement l’ensemble des chaises provoquant une marée qui n’hésite en rien quant à la direction qu’elle doit emprunter
l’origine du flot, qui est tout sauf linéaire, est de plus en plus brouillée tant il est devenu impossible d’endiguer le flux incessant de l’attrape-mouches tant envahissant
on tente de créer un monticule de chaises mais les assises se soudent par le beurre en mouvement, adhérant définitivement aux séants accolés, durcissant
on ne distingue plus aucune direction ailleurs qu’en se faufilant dans l’infiltration à contre-courant de la matière grasse sous les assises
mais soudain tout se fige et se durcit dans une nature morte de l’image du gras se desséchant le long des canaux et des fossés, soudant le mouvement dans une rangée fixe de sièges